Saint-Patrick : la bière, kézako ?

Saint-Patrick : la bière, kézako ? #2

Blonde, brune, IPA, stout, porter… Vous y retrouvez-vous entre tous ces types de bière ?

Vous attachez peut-être à chaque catégorie des qualités gustatives et d’apparence bien définies. Mais savez-vous d’où viennent ces différences dans le produit fini, lorsqu’on part souvent de la même base d’ingrédients ?

Dans cette série d’articles dédiés à la Saint-Patrick, nous vous proposons de plonger dans le nébuleux univers des bières, pour espérer y voir un peu plus clair !

La semaine dernière, nous avions réuni tous les ingrédients nécessaires à la fabrication de la bière. Eau, houblon, levure, et malt, souvent d’orge. Cette semaine, on s’attaque à la fabrication.

Fabrication de la bière : les premières étapes

D’abord, pourquoi et comment fait-on du malt ?

Le maltage : production d’enzymes

La matière première dont on dispose au départ est le grain d’orge, qui renferme une grande quantité d’amidon. L’objectif final est d’aboutir à la formation d’alcool par les levures. Or celles-ci sont capables de fermenter les sucres, mais pas l’amidon, qui est en fait un assemblage de sucres.

Avant de lancer la fermentation, il va donc falloir dissocier les sucres présents dans l’amidon. Pour cela, le malteur va imiter le développement naturel du grain d’orge, et le faire germer. Il va alors produire des enzymes, des molécules qui vont décomposer l’amidon en sucres.

Concrètement, pour aboutir au malt, on va faire tremper les grains d’orge, puis les laisser germer par eux-mêmes, ce qui va donner naissance au malt vert. Et enfin, on arrive à l’étape cruciale qui va avoir un fort impact sur la bière obtenue en fin de process : le touraillage.

Un nom un peu barbare qui désigne en fait une étape de séchage et de chauffage (torréfaction) du malt vert. Ce « coup de feu » dure une à quatre heures et atteint une température comprise entre 85°C et 105°C. Ces paramètres sont cruciaux car ils vont déterminer la robe de la bière et également l’arôme de caramel ! Eh oui, pour obtenir une bière blanche, blonde, ambrée, ou brune, il faut jouer sur le touraillage du malt, et plus particulièrement sur l’étape de torréfaction ! Vous connaissez peut-être aussi les bières stout qui sont obtenues à partir de malt très torréfié ce qui va leur donner leur robe noire caractéristique.

Grâce au maltage, on a pu obtenir des enzymes, véritables petites usines à découpage de l’amidon en sucres. Ensuite, il va falloir les faire travailler ! C’est là tout l’objectif du brassage, aussi appelé saccharification (le saccharose étant du sucre).

Obtention de malt
Obtention de malt

Le brassage : dégradation de l’amidon

La première étape du brassage est la formation de « maische » par concassage et hydratation du malt. Ensuite, le mélange sera chauffé pour activer les enzymes et les faire agir sur l’amidon. Enfin, le tout sera filtré, comme pour du café, afin d’extraire le moût primitif. Le résidu solide est utilisé pour nourrir le bétail.

Brassage artisanal
Brassage artisanal

Le houblonnage : ajout d’arômes et d’amertume

C’est à ce moût primitif que l’on va ajouter le houblon, et éventuellement des épices. C’est l’étape d’aromatisation ou houblonnage. Le mélange est porté à ébullition pour faire apparaître des saveurs amères ainsi que d’autres arômes. La lupuline, résine jaunâtre sécrétée par les fleurs femelles de houblon, est la responsable de ce goût. Selon la durée de l’ébullition, le résultat ne sera pas le même : plus elle est longue, plus l’amertume sera forte. Cette température permet également de détruire les enzymes qui ont terminé leur travail de décomposition de l’amidon. À cette étape, on obtient enfin notre moût, prêt à subir la fermentation.

Le taux de houblonnage des bières industrielles se réduit chaque année. Les industriels, très attentifs aux goûts des consommateurs, s’y adaptent sans cesse, or ceux-ci privilégient les bières les moins amères. À l’inverse cependant, les micro-brasseries, en plein essor depuis les années 80, utilisent de plus en plus de houblon pour augmenter l’amertume de leurs bières. L’IPA, ou India Pale Ale, est une bière très houblonnée originellement inventée au XVIIIe siècle mais ressuscitée il y a une quarantaine d’années. Arrivée sur le marché français récemment, elle a eu un grand succès en raison de son goût tranchant avec celui des bières industrielles, rendues de plus en plus fades pour plaire au plus grand nombre. Les brasseries artisanales et micro-brasseries offrent donc tout un panorama de saveurs difficilement trouvables en version industrielle, ce qui les rend d’autant plus attrayantes !

Dans le prochain et dernier article de cette série, nous nous intéresserons à la fermentation, étape capitale de l’élaboration de notre boisson préférée de la Saint-Patrick, et qui permet de distinguer une très large palette de bières selon la méthode utilisée.

Par Marianne Lachaud